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Contribution française
au Livre Orange Européen
La défense

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"Quand les riches se font
la guerre, ce sont les pauvres qui meurent"
J.-P. Sartre
Depuis
qu'en 1439, par une ordonnance royale dite d'Orléans, déclarée
conforme par les états du Royaume - corps intermédiaires nécessaires,
alors, au rétablissement du pouvoir royal -, Charles VII institua l'armée
permanente, l'histoire de France est indissociable de celle de son armée.
Charles de Gaulle disait : "le génie de la France se reflète
fidèlement au miroir de son armée". L'annonce de l'abandon
du service militaire a entraîné de vastes débats sur le
rôle de l'armée, sur la teneur des liens entre celle-ci et la
Nation tout entière. En 1994, le Livre blanc sur la défense
définissait les grandes lignes de la politique de défense et
amorçait les réformes qui sont engagées actuellement.
La conception de la sécurité qui prévaut est une conception
néocoloniale. Pour le Livre blanc, "l'objectif premier de la politique
de défense est de défendre les intérêts vitaux
et stratégiques du pays, ainsi que ceux correspondant à nos
responsabilités internationales et à notre rang dans le monde".
C'est notamment dans ce sens que la France a développé l'arme
nucléaire. On pourrait parler aussi de conception néonapoléonnienne,
dans le sens où la France s'arroge le droit d'intervenir militairement
pour exporter ses valeurs - la démocratie, l'Etat de droit, les droits
de l'homme, et l'économie de marché.
Les
humanistes ne partagent pas les présupposés fondateurs d'une
telle politique. Par exemple, celui de la légitimité du recours
à la violence, qui est basé sur une conception naturaliste de
l'être humain : " l'être humain étant par nature violent,
il est parfois nécessaire de recourir à la force pour le contraindre
". D'autre part, la carte des intérêts stratégiques
de la France dénote un racisme persistant. Du nord de l'Amérique
(Saint-Pierre et Miquelon) au sud de l'Afrique (Iles Kerguelen) et à
la Polynésie, la France s'estime chez elle, au mépris des peuples
et de la géographie.
Les
humanistes sont donc favorables à une redéfinition totale de
la politique de défense.
En
premier lieu, c'est le rôle de la France au niveau international qui
mérite d'être revu. Il est ahurissant que l'organisation actuelle
des Nations unies confie la sécurité du monde aux 5 pays les
plus agressifs (car officiellement détenteurs de l'arme génocidaire
par excellence, l'arme nucléaire), dont la France. La France gagnerait
à prendre l'initiative de relancer la course au désarmement,
progressif, multilatéral et négocié. Elle devrait aussi
se retirer de l'Otan et contribuer à l'émergence d'une Europe
pacifiée et progressivement démilitarisée.
En second lieu, c'est le rôle des forces armées
qui devra être redéfini. Plutôt que de préparer
la guerre ( "si vis pacem, para bellum"), elles devraient préparer
la paix et agir pour prévenir les guerres.
En troisième lieu, il convient de réduire
les dépenses militaires, qui grèvent lourdement le budget de
l'Etat. Les forces armées doivent être progressivement réduites
et l'industrie d'armement doit s'engager dans un processus de reconversion
au service de productions civiles.
1-
La situation actuelle :

A. La Constitution de 1958
Selon l'article 15 de la Constitution, le Président
de la République est le chef des armées. Il préside les
conseils et comités supérieurs de la Défense nationale.
L'article 20 précise que le Gouvernement dispose de la force armée
et l'article 21 que le Premier ministre est responsable de la Défense
nationale et supplée, le cas échéant, le Président
de la République dans la présidence des conseils et comités
prévus à l'article 15. Enfin, l'article 35 stipule que la déclaration
de guerre est autorisée par le Parlement. L'ordonnance du 7 janvier
1959 définit l'organisation générale de la défense,
ainsi que 4 décrets du 18 juillet 1962.
Pays fondateur de l'Otan, la France n'en a pas moins développé
une position originale en son sein. En 1966, le Général de Gaulle
a retiré la France du Commandement intégré de l'Otan
et appelé les armées étrangères à quitter
le sol français. Au contraire de ses partenaires européens,
la France n'accueille pas de bases de l'Otan. Mais les dernières années,
elle s'est rapprochée de la tutelle américaine et se distingue
de moins en moins.
B. Budget
Le
budget de la défense est le 3ème budget de l'Etat, après
l'éducation (y compris la recherche) et le service de la dette. Pour
l'année 1999, le budget de la défense atteint 244 milliards
de francs (MdF), soit 15 % du budget de l'Etat.
Les investissements militaires (86 MdF) représentent plus de la moitié
des investissements de l'Etat.
Le budget 1999 est en progression de 2,2 % par rapport à 1998. Les
dépenses en équipement sont en augmentation de 6,2 %.
L'importance des dépenses militaires doit être fortement remise
en question. Sait-on que lorsqu'on paye 100 F d'impôts, 15 F vont aller
à l'armée ?
La part de la Défense représente 2,8 % du Produit Intérieur
brut (PIB), ce qui montre l'important degré de militarisation de l'économie
française et place la France juste derrière les Etats-Unis dans
ce domaine.
C. Service militaire
Le
Livre blanc de 1994 affirmait la pérennité des principes du
service national - égalité et universalité - et écartait
la possibilité d'une armée de métier (trop coûteuse).
Pourtant, en février 1996, le Président de la République
annonçait la suspension du service militaire de conscription et la
constitution d'une armée professionnelle. Cette décision a été
dénoncée par certains courants, attachés aux liens entre
l'armée et la nation et craignant une armée coupée du
peuple. Une journée d'appel et de préparation à la Défense,
obligatoire pour les garçons et les filles, a été instituée.
D'autre part, la réduction du format des armées et le vaste
mouvement de réformes, restructurations, suppressions d'unités
posent un certain nombre de problèmes sociaux.

2. Propositions

A. Rôle des forces armées
L'armée
est une institution qui, par son mode d'entraînement, de discipline
et par son équipement, a pour fonction principale la destruction. En
dépit de l'aversion que nous ressentons envers toute forme de violence,
nous ne pouvons pas proposer la disparition totale, immédiate et unilatérale
de toute force armée, car cela créerait des vides qui pourraient
être comblés par d'autres forces agressives. Mais les forces
armées ont un rôle important à jouer, d'une part en s'abstenant
de toute obstruction aux processus de désarmement, et d'autre part
en incitant les autres militaires à avancer dans la direction du désarmement.
Elles devraient montrer clairement que la fonction militaire dans le monde
d'aujourd'hui est d'éviter les catastrophes dues à des gouvernements
illégitimes. Le meilleur service qu'elles pourraient rendre à
l'humanité serait d'éviter les guerres.
Cette nouvelle définition devrait entraîner
une refonte de la formation des militaires professionnels, centrée
sur l'éthique, valorisant la responsabilité humaine, en quelque
situation que ce soit. Il est désormais clair que l'obéissance
due ne saurait justifier la violation des droits de l'homme et les crimes.
Dans les situations de guerre, les militaires ne peuvent en aucun cas porter
atteinte aux populations civiles.
D'autre part, les forces armées devraient se
tenir au respect de la légitimité incarnée par le peuple,
et non par le pouvoir politique, si celui-ci tourne le dos au peuple.
Dans le processus de mondialisation et d'intégration européenne,
les armées devraient s'engager pour la paix, pour le respect des minorités
et le rejet de la violence.
B. Budget et désarmement
En
Europe, l'Otan doit être démantelée et les bases américaines
fermées. L'Europe doit être dénucléarisée
et le nombre total des forces armées doit progressivement diminuer.
Les forces de projection extérieure doivent être reconverties
dans des opérations d'urgence humanitaire. Les bases françaises
à l'étranger doivent être fermées.
Le budget de la Défense doit être fortement réduit. Dans
un premier temps, la part de la défense dans le PIB devrait passer
au-dessous de 1%. Les industries d'armement doivent diversifier leur production
et s'engager dans un processus de reconversion civile.
C. Service militaire
Le
service militaire doit être totalement facultatif. Les journées
obligatoires d'appel et de préparation à la défense doivent
être supprimées. Plutôt que d'éduquer à "l'esprit
de défense", l'enseignement moderne devrait s'axer sur l'étude
de la violence et de la non-violence.
Les militaires doivent bénéficier des mêmes protections
et devoirs que les autres citoyens. En particulier, ils doivent pouvoir adhérer
à organisations syndicales et exercer le droit de grève.

3. Bibliographie

Constitution de la République française (textes et révisions),
Pierre Avril et Gérard Conac, Ed. Montchrestien 1996
Livre blanc sur la défense 1994, Ed. 10-18, 1994
Revue l'Armement, N°43, Livre blanc et loi de programmation militaire,
Août 1994
Site Internet du Ministère de la défense
L'art de la guerre, Sun Tzu, Ed. Flammarion, 1972
Lettre à mes amis n°8, Silo, Ed. Références,
1994
Quelques termes fréquents de l'humanisme, Centre mondial d'études
humanistes, Ed. Références, 1995
Charte des Nations Unies
Le Livre de la Paix, Ed. Fayard, 1980, Bernard Benson

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